À 95 ans, Ahn Hak-sop, ancien prisonnier de guerre nord-coréen, souhaite retourner au Nord pour y être enterré. Après des décennies passées en Corée du Sud, il a tenté de franchir la frontière, espérant réaliser ce qu'il considère comme son dernier voyage. Cependant, il a été refoulé, comme prévu, par le gouvernement sud-coréen qui a déclaré ne pas avoir le temps de préparer les conditions nécessaires.
Malgré son état de santé fragile, Ahn a parcouru une courte distance à pied, soutenu par des amis. Il a brandi un drapeau nord-coréen, un acte qui a choqué beaucoup de Sud-Coréens. Lors de son intervention, il a exprimé son désir de reposer dans une terre indépendante, loin de l'impérialisme.
Ahn Hak-sop a été capturé à l'âge de 23 ans, après avoir rejoint l'Armée populaire nord-coréenne. Il a été arrêté en 1953, peu avant l'armistice, et condamné à la réclusion à perpétuité. Libéré 42 ans plus tard grâce à une grâce spéciale, il a toujours été stigmatisé en tant que "rouge", ce qui a compliqué sa réinsertion dans la société sud-coréenne.
Il a raconté que le gouvernement ne l’a pas beaucoup aidé et qu'il a vécu sous surveillance pendant des années. Bien qu'il ait fondé une famille, il n'a jamais eu le sentiment d'appartenir pleinement à la Corée du Sud, vivant dans un petit village proche de la frontière.
En 2000, Ahn a refusé une offre de retour au Nord, espérant une amélioration des relations entre les deux Corées. Il craignait que le départ ne soit perçu comme un triomphe américain. Selon lui, le seul obstacle à la réunification était l'impérialisme américain et un gouvernement sud-coréen soumis.
Cette conviction est enracinée dans son histoire personnelle. Né en 1930 sous l'occupation japonaise, il a toujours considéré que la libération de 1945 n'était qu'un transfert de règle coloniale. Les tensions entre le Nord et le Sud, selon lui, sont le résultat de provocations sud-coréennes, soutenues par les États-Unis.
Ahn a subi de nombreuses humiliations en prison, refusant de signer des documents renonçant à ses idéaux communistes. Il a décrit des jours remplis de chagrin et de douleur, où il devait vérifier ses mains pour s'assurer qu'il n'avait pas été forcé à signer. Ces expériences ont été reconnues par une commission d'enquête sud-coréenne sur les droits de l'homme.
Malgré les abus qu’il a subis, il reste attaché à ses convictions. Il a affirmé que sa souffrance ne pouvait être décrite par des mots, mais qu'il se sentait victorieux tant qu'il ne cédait pas à la pression.
Depuis son départ, la Corée du Nord a beaucoup changé, mais Ahn soutient que le pays prospère. Il défend même les décisions de Kim, notamment l'envoi de troupes pour soutenir la Russie en Ukraine. En revanche, la Corée du Sud est devenue une démocratie puissante, mais Ahn reste convaincu que son pays est toujours sous domination américaine.
Il a consacré les 30 dernières années de sa vie à protester contre ce qu'il considère comme une colonisation continue par les États-Unis. Pour lui, la lutte pour la réunification est essentielle, et il espère que les générations futures pourront vivre dans une Corée unie.
Ahn Hak-sop incarne une histoire complexe et douloureuse, celle d'un homme dont les convictions et les souvenirs sont profondément ancrés dans un passé tumultueux. Son désir de retourner au Nord pour y reposer en paix témoigne d'une vie marquée par des luttes pour l'identité et la liberté. Son histoire soulève des questions sur l'avenir des relations entre les deux Corées et sur la mémoire collective des conflits passés.