
La politique européenne a récemment changé de cap, passant d'une forte orientation vers la durabilité à une préoccupation croissante pour la compétitivité. Cette transition est marquée par trois règlements clés : la CSRD, la CSDDD et la Taxonomie. Ces initiatives visaient à établir un cadre cohérent et transparent pour la transition verte.
Cependant, la pression politique et les événements récents ont modifié cette priorité. La Commission Européenne a proposé un paquet Omnibus en février 2025, qui vise à simplifier la réglementation environnementale. Ce paquet inclut des mesures comme le Stop-the-Clock, qui retarde l'application de certaines directives. Cela soulève des questions sur l'efficacité de ces changements.
Malgré les efforts de la Commission, des préoccupations subsistent quant à l'improvisation réglementaire. Le paquet Omnibus a été présenté sans évaluation d'impact ni transparence sur les consultations publiques. Ce manque de rigueur crée un précédent inquiétant pour la simplification réglementaire.
De plus, bien que le paquet introduise des délais et des flexibilités, il ne résout pas le problème de la duplication réglementaire. Les entreprises font face à un ensemble d'obligations qui exigent des données similaires, mais selon des logiques différentes, ce qui entraîne des coûts administratifs accrus.
Un des changements les plus controversés est la limitation de la CSDDD aux fournisseurs directs. Bien que cela puisse alléger la charge administrative, les risques majeurs se trouvent souvent en profondeur dans la chaîne d'approvisionnement. Cela crée une incohérence avec la CSRD, qui exige une transparence sur l'ensemble de la chaîne de valeur.
En outre, la proposition d'éliminer l'obligation de plans climatiques contraignants favorise un conformisme formel sans transformations réelles. Les entreprises pourraient être incitées à produire des documents sans impact tangible sur leur gestion environnementale.
La CSDDD impose aux filiales européennes de groupes non communautaires de respecter des seuils de chiffre d'affaires. Cela oblige des filiales avec peu d'employés à contrôler l'ensemble de la chaîne globale, même dans des pays sans lien avec l'UE. Ce caractère extraterritorial pourrait avoir des conséquences sur la délocalisation et l'attractivité des investissements.
De plus, le Stop-the-Clock engendre une confusion quant aux exigences et aux délais. Cette incertitude peut entraîner une paralysie des investissements, alors que l'Europe a besoin de stabilité pour rivaliser avec les politiques industrielles des États-Unis et de la Chine.
La proposition d'augmenter les seuils d'application à 5 000 employés et 1 500 millions d'euros pourrait sembler bénéfique. Cependant, cela exclut des entreprises ayant des impacts environnementaux significatifs, tout en incluant des groupes avec des risques moins importants. Cela crée de nouvelles distorsions dans le paysage réglementaire.
En tant que fervents partisans de la simplification réglementaire, nous considérons que le paquet Omnibus ne constitue pas une réelle simplification. Au contraire, il pourrait mener à un cadre incohérent et à une dilution des normes environnementales. Pour que l'UE regagne en crédibilité, il est essentiel de concevoir un cadre réglementaire qui aligne objectifs, obligations et portée de manière cohérente.
Pour véritablement simplifier, il ne suffit pas de retarder des délais ou de réduire certaines obligations. Il est crucial de refondre l'architecture réglementaire en alignant les portées et les objectifs, tout en intégrant des évaluations d'impact rigoureuses. Cela permettra à l'UE de créer un cadre qui favorise la durabilité sans compromettre la compétitivité.