
Le 29 avril 2024, le média britannique Sky News a surpris le marché en annonçant que BBVA était en discussions avec Sabadell pour une offre. Cette information a été perçue comme une fuite intéressée, bien qu'elle n'ait jamais été confirmée. Ses conséquences ont été inévitables et ont conduit BBVA à accélérer un processus né dans un contexte délicat.
Ce projet est survenu à quelques jours des élections autonomiques en Catalogne, transformant l'OPA en un véritable sujet d'État. Ce fut le premier de quatre obstacles qui ont mis à mal la feuille de route de Carlos Torres, tant en termes de coûts que de finances.
Ce n'était pas la première fois que Carlos Torres tentait d'acquérir son rival espagnol. En novembre 2020, en pleine pandémie, des discussions avaient eu lieu mais s'étaient interrompues faute d'un prix convenable. À l'époque, la capitalisation boursière de Sabadell était dix fois inférieure à l'offre qui a été rejetée par la majorité des actionnaires.
Malgré tout, Torres a décidé de poursuivre ce projet, qu'il a qualifié de personnel. Le 9 mai, il a annoncé une OPA hostile, la deuxième dans l'histoire bancaire espagnole, juste avant les élections catalanes. Une offre similaire avait eu lieu en 1987, lorsque le Banco Bilbao avait tenté d'acquérir Banesto.
Cette offre, qui datait d'un an et demi, offrait une prime de 30% sur la cotation de Sabadell. Cependant, BBVA n'avait pas anticipé le retard dans le processus, ce qui a rendu le discours de Torres obsolète.
L'intervention du gouvernement a été déterminante pour compromettre les calculs de BBVA. Torres et Onur Genç, le PDG, ont reconnu que c'était une erreur d'annoncer l'OPA en pleine campagne électorale. Cela a transformé l'opération en un enjeu politique majeur.
La Commission Nationale des Marchés et de la Concurrence (CNMC) a ensuite envoyé la fusion en phase II, un processus sans précédent en Espagne. Cela a entraîné une consultation publique, jugée populiste à Bruxelles, qui a ouvert un dossier contre l'Espagne.
Le 24 juin, le conseil des ministres a approuvé la fusion avec des conditions restrictives. BBVA ne pouvait pas intégrer Sabadell sous sa marque pendant au moins trois ans. Ce nouveau contexte a contraint l'entité à revoir ses chiffres et à mettre à jour son prospectus.
En parallèle, Sabadell a annoncé la vente de sa filiale britannique TSB à Banco Santander, ce qui a nécessité une approbation de la part de ses actionnaires. Cela a entraîné un megadividende de 2,5 milliards d'euros à distribuer une fois la vente finalisée.
Finalement, la CNMV a annoncé le résultat de l'OPA, déclarant l'opération sans effet en raison d'un soutien insuffisant des actionnaires de Sabadell. Seul 25% du capital a participé au processus, et la majorité des gestionnaires espagnols ont choisi de ne pas s'engager.
Carlos Torres a reconnu la défaite, parlant d'une opportunité perdue. BBVA se concentrera désormais sur la rémunération de ses actionnaires, tout en affirmant que sa continuité au sein de la banque ne dépendait pas de ce processus.
En somme, cette tentative d'OPA a révélé des enjeux complexes et des dynamiques politiques qui ont largement influencé le résultat. BBVA devra maintenant se réorienter et renforcer ses relations avec ses actionnaires, tout en apprenant de cette expérience.