La République Démocratique du Congo est en proie à un profond chaos, avec les combattants du groupe rebelle M23 qui progressent rapidement dans l'est du pays. En l'espace de deux semaines, des milliers de personnes auraient perdu la vie, entraînant une escalade des tensions entre la RDC et son voisin, Rwanda. Pour comprendre cette situation complexe, il est essentiel de se pencher sur l'histoire de Sultani Makenga, le leader du M23.
Né le 25 décembre 1973 à Masisi, Sultani Makenga a grandi dans une famille de l'ethnie Tutsi. À l'âge de 17 ans, il quitte l'école pour rejoindre un groupe rebelle Tutsi en Rwanda. Ce groupe, le Front patriotique rwandais (FPR), militait pour une meilleure représentation des Tutsis au sein du gouvernement rwandais, alors dominé par les Hutus.
Durant quatre ans, Makenga et le FPR ont combattu l'armée dominée par les Hutus. Ce conflit était enchevêtré dans le génocide de 1994, où environ 800 000 Tutsis et Hutus modérés ont été tués. Dans une interview, il a déclaré : "Ma vie est la guerre, mon éducation est la guerre, et ma langue est la guerre... mais je respecte la paix."
En 1997, Makenga fait partie des forces soutenues par le Rwanda qui renversent le régime de Mobutu Sese Seko en RDC, installant Laurent Kabila à sa place. Cependant, des tensions apparaissent rapidement entre Makenga et ses supérieurs, ce qui conduit à son arrestation et à plusieurs années d'emprisonnement sur l'île d'Iwawa.
Les relations entre Kabila et le Rwanda se détériorent, entraînant une invasion rwandaise en 1998. À sa libération, Makenga devient commandant sur le front avec un groupe rebelle soutenu par le Rwanda, où il se forge une réputation de stratège militaire.
Au fil des ans, Makenga se joint à la rébellion M23, qui se déclare protectrice des droits des Tutsis. En 2012, il mène une révolte brutale, capturant la ville de Goma. Les accusations de soutien rwandais à la M23 se multiplient, mais Kigali les nie fermement. En réponse, le gouvernement rwandais évoque la menace à sa sécurité.
En 2012, Makenga fait face à de graves accusations de crimes de guerre, notamment le recrutement d'enfants soldats. Bien qu'il qualifie ces allégations de "sans fondement", les Nations Unies l'accusent de violences sexuelles et d'autres atrocités.
Malgré des sanctions et une scission au sein du M23, Makenga parvient à maintenir son pouvoir. En 2013, il remporte une lutte de pouvoir contre son rival, le général Bosco Ntaganda, qui finit par fuir au Rwanda. Ntaganda, surnommé le "Terminator", est finalement condamné à 30 ans de prison pour crimes de guerre.
Après un retrait de la M23, Makenga se réfugie en Ouganda, mais il refait surface en 2021, reprenant les armes et capturant des territoires dans la province du Nord-Kivu. Les cessez-le-feu échouent, et un juge le condamne à mort par contumace.
Sultani Makenga reste une figure clé dans le conflit de la RDC, malgré sa rare présence publique. Il affirme que son combat est pour l'avenir de ses enfants, tout en étant conscient que des millions de civils souffrent à cause de cette guerre. Si Makenga est capturé, il pourrait faire face à la peine de mort, mais son engagement demeure indéfectible : "Je suis prêt à sacrifier tout."