Depuis trois décennies, l'espoir des Érythréens s'est évanoui. Au début de la présidence d'Isaias Afwerki, beaucoup voyaient en lui un réformateur. Aujourd'hui, après 32 ans au pouvoir, il a déçu les attentes. Isaias, âgé de 79 ans, passe la majorité de son temps dans sa résidence rurale, loin de la capitale, Asmara.
Le cabinet n'a pas été réuni depuis 2018, et tout le pouvoir est concentré entre ses mains. Comme un potentat, il reçoit des officiels locaux et étrangers, tout en attirant des Érythréens ordinaires espérant des solutions à leurs problèmes.
Dans les années 1990, Isaias était un symbole d'espoir. À 45 ans, il a conduit le Front de libération du peuple érythréen (EPLF) à la victoire contre l'Éthiopie en 1991. Les Érythréens commémorent chaque année les martyrs de cette guerre le 20 juin. Charismatique, il inspirait confiance tant au niveau national qu'international.
En 1993, après l'indépendance, il a pris la parole sur la scène mondiale. À un sommet à Le Caire, il a critiqué les anciens dirigeants africains, promettant un ordre démocratique pour son pays. Son engagement a suscité l'admiration des Érythréens et des diplomates.
Malheureusement, l'optimisme des années 1990 s'est rapidement estompé. En 1998, la guerre a éclaté avec l'Éthiopie, et Isaias a été accusé d'utiliser ce conflit pour retarder les élections. Malgré sa promesse d'un système démocratique, la situation a empiré après l'accord de paix de 2000.
Des ministres, y compris des amis proches, ont commencé à demander des réformes. En mars 2001, le groupe connu sous le nom de G-15 a accusé le président d'abuser de son pouvoir. Ils ont exigé l'application de la constitution et des élections nationales.
En septembre 2001, alors que le monde était distrait par les attentats du 11 septembre, le gouvernement a réprimé la liberté de la presse. Tous les journaux indépendants ont été fermés, et de nombreux journalistes ont été arrêtés. Les espoirs d'une ouverture démocratique se sont évaporés.
Isaias a clairement indiqué qu'il n'avait aucune intention de permettre des réformes démocratiques. Son régime a été critiqué pour son autoritarisme, et le pays a été isolé sur la scène internationale. Cependant, certains de ses partisans le considèrent comme un symbole de libération nationale.
Économiquement, l'Érythrée a souffert. Selon la Banque mondiale, l'activité économique est limitée par une infrastructure sous-développée et un contrôle strict des importations. Isaias lui-même a reconnu les défis économiques lors d'une interview en décembre dernier.
De nombreux Érythréens, en particulier les jeunes, vivent un quotidien difficile. Le service national indéfini et la violence d'État les poussent à fuir le pays. Au cours des deux dernières décennies, des centaines de milliers ont risqué leur vie pour chercher la liberté.
Lors de son discours du jour de l'indépendance, Isaias n'a fait aucune mention de réformes ou d'élections. Malgré la frustration croissante, il conserve le soutien de certains segments de la population. Alors qu'Isaias approche de ses 80 ans, l'avenir de l'Érythrée reste incertain, et beaucoup craignent ce qui pourrait suivre.