Depuis que le cinéma existe, peu d'arts peuvent se vanter d'avoir autant emprunté. L'invention des Lumière a puisé dans le théâtre, la photographie, et bien d'autres formes d'art. Lorsque les cinéastes ont épuisé ces sources, ils ont commencé à s'inspirer les uns des autres, souvent en prenant des idées de D. W. Griffith.
Le cinéma a toujours été marqué par le vol. Dès ses débuts, avec "L'Assaut et le vol d'un train" d'Edwin S. Porter en 1903, le thème du vol a captivé le public. Kelly Reichardt, réalisatrice, en est consciente. Dans ses œuvres, comme "Wendy et Lucy", ses personnages volent, même si ce n'est pas à grande échelle.
Dans "The Mastermind", le vol devient l'élément central de l'intrigue. Ce film, qui clôt la compétition officielle, est une véritable heist movie, mais avec une approche unique. Reichardt, avec son style inimitable, nous plonge dans un récit où le vol n'est pas qu'un acte, mais une réflexion sur la nature humaine.
Le protagoniste de "The Mastermind" est un carpenter au chômage, devenu voleur d'art. Situé dans les années 70, le film montre comment les vols analogiques étaient possibles. Ce personnage, bien que maladroit, incarne un héros à l'antithèse de l'idéal traditionnel. Il est, en quelque sorte, un "attracteur désenchanté".
Reichardt construit avec soin les impasses que rencontre son personnage. Elle recrée l'époque avec une attention méticuleuse, offrant une atmosphère de désespoir et de vide. L'idée centrale est de remplacer l'agitation par la tranquillité, le héroïsme par la fatalité, et l'excitation par la lassitude.
Reichardt aime jouer avec les inversions d'idées préconçues. Dans ses films précédents, comme "Meek's Cutoff" et "First Cow", elle a réinterprété le western pour en révéler les vérités cachées. Ces récits, bien que déroutants, sont à la fois originaux et reconnaissables.
Dans "The Mastermind", la bande sonore de jazz renforce cette inversion. Le film évoque une atmosphère chaude et mélancolique, où le vol devient une métaphore de la condition humaine. Ici, tout le monde se rend, et la tristesse d'un vol échoué est palpable.
En fin de compte, "The Mastermind" de Kelly Reichardt nous rappelle que le vol, bien que triste, est moins désolant que l'idée de ne rien avoir à voler. Ce film, à travers ses personnages et son récit, nous interroge sur notre rapport à la loi, à l'ordre et à notre propre existence. C'est une œuvre qui résonne profondément, nous laissant réfléchir sur le sens du vol et de la vie.