Harvard University a accepté de transférer un ensemble de photos historiques considérées comme parmi les premières à représenter des personnes asservies aux États-Unis. Cet accord met fin à une longue bataille juridique entre l'institution et Tamara Lanier, une auteure du Connecticut qui revendique être la descendante de deux personnes figurant sur ces photos.
Les images, prises en 1850, seront transférées au Musée international afro-américain en Caroline du Sud, où les personnes représentées ont été asservies. Harvard a déclaré avoir toujours espéré que ces photos seraient données à un autre musée. Mme Lanier a exprimé son enthousiasme face à ce résultat.
Les photos sont des daguerréotypes, une forme très ancienne de photographie moderne, capturées 15 ans avant le 13ème amendement de la Constitution américaine qui a aboli l'esclavage. Ces images ont été redécouvertes dans les stockages du Musée Peabody d'archéologie et d'ethnologie de Harvard en 1976.
Les 15 images présentent des individus identifiés par le musée comme Alfred, Delia, Drana, Fassena, Jack, Jem et Renty. Selon Mme Lanier, le règlement implique le transfert de toutes les images, et pas seulement celles concernant Renty et Delia.
Les photos avaient été commandées par le professeur et zoologiste Louis Agassiz, dans le cadre de recherches discréditées visant à prouver la supériorité des personnes blanches. Agassiz soutenait le polygenisme, une croyance désormais réfutée selon laquelle les races humaines évoluaient séparément.
Cette affaire a suscité un débat public sur la façon dont les universités américaines devraient répondre à leurs liens historiques avec l'esclavage. En 2016, la Harvard Law School a accepté de modifier un blason basé sur celui d'un propriétaire d'esclaves du XVIIIe siècle.
En 2019, Mme Lanier a poursuivi Harvard, affirmant que les images avaient été prises sans consentement et accusant l'université de tirer profit de celles-ci par le biais de frais de licence élevés. En 2022, la Cour suprême du Massachusetts a confirmé un jugement antérieur qui rejetait sa revendication de propriété.
Cependant, elle a été autorisée à demander des dommages-intérêts pour détresse émotionnelle. La cour a déclaré que Harvard avait une complicité dans les « actions horribles » entourant la création des images.
Mme Lanier a déclaré à la BBC qu'elle était « écstatique » à propos du règlement. Elle a exprimé qu'elle savait qu'elle ne pourrait jamais prendre soin des daguerréotypes au niveau requis. Le musée de Caroline du Sud a aidé Mme Lanier avec ses revendications généalogiques, mais n'a pas été impliqué dans la bataille juridique.
Le président du musée a déclaré qu'ils comptaient conserver et exposer les images « dans un contexte de vérité et d'empathie ». Tonya Matthews a souligné que ces images ne sont pas douces et que l'histoire qui les entoure est encore plus difficile à entendre.
Le transfert des daguerréotypes de Harvard vers le musée international afro-américain marque une étape importante dans la reconnaissance des injustices passées. Cela permet non seulement de préserver l'histoire, mais aussi d'initier des discussions sur l'impact durable de l'esclavage. Ce geste symbolique pourrait ouvrir la voie à une meilleure compréhension et à la réconciliation.