Un nouveau macrojuicio sexuel secoue la société française. Deux mois après le verdict du cas de Gisèle Pelicot, qui a abouti à 20 ans de prison pour son ex-mari Dominique, l'attention se concentre sur l'ex-chirurgien Joël Le Scouarnec. Il est accusé d'avoir abusé sexuellement de 299 enfants, la plupart âgés de moins de 15 ans et sous anesthésie.
Le cas Pelicot a mis en lumière la vulnérabilité des femmes et la complicité entourant les viols. En revanche, le cas Le Scouarnec pourrait marquer la fin d'un tabou qui a perduré des décennies concernant les abus sur mineurs. Cela a permis au chirurgien pédophile de réaliser ses fantasmes les plus dépravés, documentés dans ses journaux, tout en restant dans le silence de la classe médicale et de sa propre famille.
Le cadre médiatique s'est déplacé d'Avignon à Vannes, une ville de 50 000 habitants en Bretagne. Elle est actuellement envahie par 470 journalistes, 67 avocats et près de 300 victimes. Ces dernières, désormais âgées de 30 à 40 ans, vont devoir revivre leurs traumatismes d'enfance.
Le palais de justice local s'est avéré trop petit pour accueillir tout le monde. Un amphithéâtre a donc été aménagé à la Faculté de Droit pour suivre les 75 jours d'audience prévus. Le procès devrait durer jusqu'en juin, et l'ex-chirurgien de 73 ans fait face à 20 ans de prison pour 100 chefs d'accusation de viol et 150 d'agression sexuelle.
Bien qu'il ait nié les accusations, affirmant qu'il s'agissait de fantasmes, ses journaux le trahissent. Il y a clairement écrit : "je suis fetichiste, sadique, maso et pédophile". Lors de la perquisition de son domicile, jusqu'à 300 000 images d'abus sexuels sur mineurs ont été découvertes, ainsi que plusieurs poupées sexuelles infantiles.
Le Scouarnec a déjà été condamné à 15 ans de prison en 2020 pour avoir violé deux de ses nièces et une patiente de six ans. Ce cas a révélé l'ampleur des abus commis pendant 25 ans dans divers hôpitaux en Bretagne, de 1989 à 2024.
Francesca Satta, avocate de plusieurs victimes, souligne que ce procès ne sera pas qu'une nouvelle sentence. Il s'agit d'un reconnaissance de l'impunité du silence qui a persisté dans l'entourage du chirurgien, de sa famille à la classe médicale qui n'a pas agi malgré les évidences.
Il y a 21 ans, le FBI avait alerté les autorités françaises sur l'accès de Le Scouarnec à des portails internet contenant des images d'abus. Il a été "accompagné" au poste de police, mais n'a même pas été arrêté, faute de preuves suffisantes. L'enquête a abouti à une suspension de quatre mois sans suivi ni traitement psychologique.
Frederic Benoist, représentant l'ONG La Vox de L'Enfant, affirme qu'il existe un haut degré de disfonctionnalité au niveau institutionnel. En 2006, une association médicale régionale a même conclu que Le Scouarnec n'avait pas violé le code éthique, malgré les suspicions d'un collègue.
Le chirurgien a profité de l'état d'anesthésie de ses jeunes patients pour commettre ses actes. La procureure a reconnu que beaucoup d'entre eux n'étaient pas conscients des agressions et n'ont donc pas pu porter plainte à l'époque. Certaines victimes ont découvert des années plus tard, par la presse, qu'elles avaient été mentionnées dans les journaux secrets de Le Scouarnec.
Le procès de Joël Le Scouarnec est un moment crucial pour la société française. Il met en lumière les abus sur mineurs et le silence complice qui les a entourés. Les victimes, comme Amélie Lévêque, doivent maintenant faire face à leurs traumatismes. Ce procès pourrait être le début d'un changement nécessaire pour la protection des enfants.