Il y a trois ans, l'invasion russe de l'Ukraine a provoqué une des plus grandes perturbations du marché énergétique européen depuis la crise pétrolière des années 70. Cette semaine, la possibilité d'un accord de paix entre la Russie et l'Ukraine a ravivé les spéculations sur les marchés. Bien qu'il soit encore tôt pour évaluer l'impact réel de la fin du conflit, un consensus émerge sur une baisse des prix du gaz en Europe.
Avant le début de la guerre, la Russie fournissait 30 % des besoins en gaz des pays européens. Actuellement, cette contribution est quasi nulle. Le gaz, auparavant importé par gazoduc, est désormais principalement acheminé par voie maritime, notamment depuis les États-Unis. Ce gaz naturel liquéfié (GNL) engendre des coûts de transport et de logistique bien plus élevés que ceux des gazoducs.
Un éventuel rétablissement des flux de gaz avec Moscou pourrait réduire significativement les factures des consommateurs européens. Selon une analyse récente de Goldman Sachs, une paix pourrait entraîner une baisse des prix du gaz TTF de 15 à 50 % à court terme, facilitant ainsi le remplissage des dépôts de gaz européens avant l'hiver prochain.
Les prévisions de Goldman Sachs indiquent que si les flux de gaz russe reprenaient, les prix pourraient atteindre environ 44 euros le mégawattheure (€/MWh). Si les volumes revenaient aux niveaux d'avant-guerre, le TTF pourrait descendre à environ 25 €/MWh. Dans le marché ibérique, le prix du gaz naturel a légèrement dépassé 50 €/MWh récemment, avec des futures pour l'hiver prochain sous les 48 €/MWh.
Goldman Sachs estime qu'un accord de paix pourrait faire chuter les prix à des niveaux bien plus proches de ceux observés avant la dernière crise. Cela pourrait avoir des répercussions significatives sur les consommateurs et les entreprises.
Une paix éventuelle pourrait engendrer des gagnants et des perdants parmi les géants pétroliers européens. La société norvégienne Equinor serait particulièrement affectée, avec une baisse potentielle de 1 à 14 % de sa trésorerie, selon Goldman Sachs. Par ailleurs, la réactivation du supply russe pourrait accroître la pression sur la Norvège, qui a fourni plus de 30 % des importations de gaz de l'UE en 2023.
En revanche, des entreprises comme BP et TotalEnergies, qui n'ont jamais complètement rompu leurs liens avec la Russie, pourraient bénéficier d'une telle paix. BP, par exemple, conserve une participation dans Rosneft, tandis que TotalEnergies détient des parts dans Novatek. Ces entreprises pourraient voir leurs détériorations comptables inversées si les sanctions étaient levées.
Étant donné que les prix du gaz influencent ceux de l'électricité, une baisse des prix du gaz pourrait également affecter le marché de l'électricité. Les analystes s'attendent à des chutes de prix si l'accord entre la Russie et l'Ukraine se concrétise. Cela pourrait réduire les marges des entreprises d'énergies renouvelables, comme Acciona Energía et Solaria.
Les entreprises pourraient être confrontées à des défis supplémentaires, notamment dans un contexte où les coûts de l'électricité sont déjà sous pression. Equinor, qui a investi dans Ørsted, pourrait également ressentir l'impact de cette dynamique de marché.
En résumé, la situation actuelle entre la Russie et l'Ukraine pourrait avoir des conséquences majeures sur le marché énergétique européen. Un accord de paix pourrait entraîner une baisse significative des prix du gaz et de l'électricité, tout en redéfinissant les dynamiques entre les grandes entreprises. Les défis et opportunités qui en découlent seront à suivre de près dans les mois à venir.