Des millions de pneus du Royaume-Uni destinés au recyclage sont envoyés en Inde, où ils sont en réalité "cuisinés" dans des fours de fortune. Cette situation entraîne de graves problèmes de santé et des dommages environnementaux considérables, selon une enquête de la BBC.
Chaque année, environ 50 millions de pneus usagés nécessitent un recyclage au Royaume-Uni. La majorité de ces pneus exportés se retrouvent sur le marché noir indien, une réalité bien connue dans l'industrie. Elliot Mason, propriétaire d'une des plus grandes usines de recyclage de pneus au Royaume-Uni, affirme : "Je ne pense pas qu'il y ait quelqu'un dans l'industrie qui ne soit pas au courant."
Les militants et de nombreux acteurs du secteur, y compris la Tyre Recovery Association (TRA), soutiennent que le gouvernement est conscient que le Royaume-Uni est l'un des pires exportateurs de pneus usagés. Le Département de l'environnement, de l'alimentation et des affaires rurales (Defra) assure avoir des contrôles stricts sur l'exportation de pneus usagés.
Lorsque les pneus quittent le Royaume-Uni, ils sont compressés en énormes cubes de caoutchouc appelés "balles". Cependant, environ 70 % des pneus importés en Inde finissent dans des usines industrielles de fortune, où ils subissent un processus de pyrolyse. Ce processus, qui se déroule dans un environnement sans oxygène à des températures atteignant 500 °C, extrait de l'acier et du noir de carbone, tout en produisant des gaz et des produits chimiques dangereux.
Des enquêtes ont révélé que ces usines, souvent situées dans des zones rurales, ressemblent à des autocuiseurs faits maison et ne respectent pas les normes de sécurité. Malgré des documents officiels affirmant que les pneus sont destinés à des centres de recyclage légaux, la réalité est bien différente.
Les travailleurs des usines de pyrolyse en Inde sont exposés à des polluants atmosphériques, ce qui les rend vulnérables à des maladies respiratoires, cardiovasculaires et neurologiques. Des scientifiques d'Imperial College Londres ont averti que cette exposition pouvait également augmenter le risque de certains types de cancer.
En janvier, une explosion dans une de ces usines a causé la mort de deux femmes et deux enfants. Après cet incident, une réunion publique a eu lieu, et le gouvernement local a promis d'agir, entraînant la fermeture de sept usines de pyrolyse.
De nombreuses entreprises britanniques envoient des pneus en Inde car cela est plus rentable. Elliot Mason souligne qu'il refuse de participer à cette pratique, se sentant responsable de s'assurer que ses déchets sont traités correctement. Les grandes entreprises comme Rubber World sont soumises à des permis environnementaux stricts, tandis que les petits opérateurs peuvent obtenir des exemptions, facilitant ainsi l'exportation.
La BBC a découvert que plusieurs de ces entreprises dépassent les limites d'exportation autorisées. Un revendeur a même admis avoir exporté 10 conteneurs de pneus en une semaine, bien au-delà de son quota permis.
La situation des pneus usagés exportés du Royaume-Uni vers l'Inde représente un problème majeur non reconnu. Des militants comme Georgia Elliott-Smith appellent à une réforme urgente, suggérant que les pneus soient reclassés comme "déchets dangereux". Le gouvernement britannique doit agir pour résoudre cette crise environnementale et de santé publique.