Il y a deux ans, un écrivain colombien a frôlé la mort dans un endroit des plus inattendus. Un pays en guerre, une pizzeria à Kramatorsk, en Ukraine, où un missile russe menaçait de frapper. Héctor Abad Faciolince, originaire de Medellín, a échappé à la tragédie grâce à un simple échange de place avec sa collègue Victoria Amelina. Ce choix minuscule a coûté la vie à Amelina, mais a sauvé celle de Faciolince.
Faciolince ne croit pas au hasard, mais plutôt aux décisions que nous prenons. Il explique que sa présence en Ukraine n'était pas une fatalité, mais un choix conscient, influencé par des amis engagés dans la campagne "Aguanta Ucrania". Cette perspective souligne l'importance de la volonté humaine face aux circonstances tragiques.
Il évoque la question du destin et du libre arbitre, affirmant que les survivants d'une tragédie se demandent souvent pourquoi certains ont péri et d'autres non. Ce sentiment d'injustice résonne profondément, surtout lorsque la vie d'une personne peut dépendre d'un simple changement de place à une table.
Le traumatisme est un sujet délicat à aborder. Faciolince souligne que personne ne s'attend à ce que sa vie dépende de détails aussi aléatoires. La perte de Victoria, qui avait l'âge de sa propre fille, a renforcé cette réflexion sur la vie et la mort. La guerre crée une atmosphère d'incertitude où même les plus jeunes peuvent être victimes.
Ce sentiment d'étrangeté, d'injustice cosmique, est exacerbée par la réalité des conflits modernes. Les bombardements indiscriminés touchent des civils, des écoles et des hôpitaux, témoignant d'une volonté criminelle de nuire au plus grand nombre.
Dans son livre, Faciolince établit un lien entre la perte de Victoria Amelina et la mémoire de son père. Les deux histoires partagent un point commun : celui de personnes courageuses silencées par la violence. Amelina a choisi de rester pour documenter les crimes de guerre, sacrifiant sa sécurité et sa famille.
Faciolince se sent responsable de donner une voix à ceux qui ne peuvent plus parler. Il tente de faire justice par les mots, tout en reconnaissant les limites de cette démarche. Les mots peuvent créer une conscience de l'injustice, mais ils ne remplacent pas l'action.
Le titre de son livre, "Maintenant et à l'heure", évoque une prière collective face à la mort. Faciolince souligne que la mort, bien que perçue comme solitaire, peut être un processus partagé. Dans des moments tragiques, il est essentiel de parler sans peur, de défendre des valeurs fondamentales.
Il souligne que la société contemporaine a besoin de voix courageuses. Dans des contextes comme ceux de Gaza ou d'Ukraine, où la vie est en danger, il est crucial d'avoir des personnes prêtes à défendre la vérité, même au péril de leur propre sécurité.
Faciolince termine en rappelant que la lutte pour la justice et la vérité est essentielle dans un monde où le pouvoir peut facilement inverser les rôles de victime et de bourreau. La résistance ukrainienne est un symbole d'espoir, et l'écrivain appelle à ne pas abandonner ces valeurs fondamentales. La voix de ceux qui souffrent doit être entendue et défendue.