
Ferran Riera, directeur de l'Escola Llissach à Santpedor, observe une tendance inquiétante chez ses élèves. De plus en plus d'enfants, même dès l'école primaire, peinent à se concentrer pendant six heures. Ces jeunes ne parviennent pas à terminer un film ou à exprimer leurs pensées, manquant de vocabulaire. Pour y remédier, il les engage dans des activités pratiques.
Riera a remarqué que les tâches manuelles réduisent le mal-être émotionnel de ses élèves. En les faisant aider à la cuisine ou en les impliquant dans des jeux avec les plus petits, il leur offre une chance de se sentir utiles. « Le travail manuel ordonne », dit-il, précisant que cela a un effet thérapeutique.
Après 27 ans d'enseignement, il constate une augmentation des autolesions et des troubles alimentaires. Dans son école, ces problèmes ont triplé. « Avant, nous avions un ou deux cas par classe, maintenant il peut y en avoir six », explique-t-il, soulignant que ces élèves proviennent souvent de familles éduquées.
Riera évoque un phénomène multifactoriel, exacerbé par le confinement. Les adultes de la génération actuelle n'ont pas transmis les valeurs essentielles aux jeunes. Cela a conduit à une absence de lien avec la réalité et un sentiment de solitude, bien que les jeunes soient constamment connectés.
Il observe que ces jeunes souffrent d'une incapacité à gérer la frustration et se sentent jugés par les adultes. Cette situation est aggravée par l'obsession pour la sécurité et la rapidité, qui caractérise notre société moderne.
Riera ne souhaite pas blâmer les parents, mais il souligne un fait : « Les parents veulent protéger leurs enfants des difficultés de la vie ». Cette protection excessive peut avoir des conséquences négatives. Les jeunes ne sont pas préparés à affronter les défis et à accepter la douleur inhérente à la croissance.
Il constate des similitudes entre les enfants hyperprotégés et ceux qui ont été abandonnés. Cette tendance à vouloir éliminer tous les obstacles empêche les jeunes de développer leur autonomie.
Dans ce contexte, Riera souligne l'importance des métiers manuels. Selon lui, « travailler avec les mains permet aux jeunes de se sentir fiers d'eux-mêmes ». Il appelle à rétablir la relation entre l'apprenti et le maître, où l'enseignement est personnalisé.
En plus de son rôle d'enseignant, Riera préside la Tots Fundació, qui lance un projet unique en Espagne : la Central des Métiers. Ce centre proposera des formations en travail manuel et accueillera des jeunes en situation de vulnérabilité.
Riera met en lumière un problème éducatif majeur. Les jeunes d'aujourd'hui ont besoin d'apprendre à surmonter les défis et à développer des compétences pratiques. Selon lui, la loi Celaá a contribué à cette crise en favorisant un modèle éducatif qui ne prépare pas les jeunes à la réalité. Il est essentiel de réévaluer nos méthodes d'enseignement pour mieux soutenir les générations futures.