Les salaires réels en Espagne ont connu une croissance modeste de seulement 2,76 % au cours des trois dernières décennies. En effet, ils sont passés de 32 157 euros par an en 1994 à 33 044 euros l'année dernière, selon les dernières données de l'OCDE. Ce chiffre place l'Espagne parmi les pays ayant le quatrième pire rendement parmi les 38 membres de l'organisation.
En comparaison, la moyenne des salaires dans l'OCDE a augmenté de 30,8 % durant la même période. Seuls le Mexique, le Japon et l'Italie affichent des performances inférieures. Les salaires au Japon et au Mexique ont chuté respectivement de 7,2 % et 0,9 %, tandis qu'en Italie, la hausse a été de seulement 0,5 %.
Dans les deux plus grandes économies de l'UE, l'Allemagne et la France, les salaires ont enregistré des augmentations significatives de 24,1 % et 28,4 %. D'autres pays méditerranéens comme le Portugal et la Grèce ont également vu des hausses notables, respectivement de 21,2 % et 22,5 %. En revanche, des pays en développement comme la Colombie, le Costa Rica et le Chili affichent des augmentations encore plus impressionnantes, atteignant jusqu'à 88,5 %.
Les pays de l'Est de l'Europe, anciens États soviétiques, ont connu les plus fortes augmentations salariales, avec des hausses allant jusqu'à 290,3 % en Lituanie. Ces changements soulignent l'importance d'analyser les salaires en termes réels, car une augmentation nominale peut masquer une perte de pouvoir d'achat.
En examinant les salaires en Espagne par rapport à la moyenne de l'OCDE, on constate que les salaires n'ont dépassé la moyenne qu'à deux périodes : dans les années 90 et juste après la crise financière de 2008. Actuellement, les salaires en Espagne sont 11 % inférieurs à la moyenne de l'OCDE, soit l'équivalent de 6 583 dollars en parité de pouvoir d'achat.
Les chercheurs José Emilio Boscá et Javier Ferri soulignent que les augmentations salariales varient selon le niveau de rémunération. Les travailleurs des déciles supérieurs ont vu leurs salaires augmenter, tandis que ceux des déciles inférieurs ont subi des baisses. Entre 2009 et 2019, la plupart des déciles ont enregistré une baisse de leur salaire réel, à l'exception des deux premiers.
La stagnation des salaires en Espagne est liée à un manque de croissance de la productivité. Selon Miguel Cardoso de BBVA Research, la rémunération par salarié n'a pas montré d'avancée significative entre 1995 et 2024. Bien que la crise financière ait temporairement augmenté la productivité, celle-ci a stagné depuis 2017.
La composition sectorielle joue également un rôle, avec une diminution du poids de l'industrie dans l'emploi total. Cette tendance vers la tertiarisation de l'économie a des conséquences sur la productivité, car de nombreuses activités de services ont une productivité faible.
En résumé, les salaires en Espagne ont connu une croissance limitée au cours des 30 dernières années, principalement en raison de la stagnation de la productivité. Les disparités salariales entre les différents déciles et la nécessité d'une amélioration de la productivité soulignent l'importance d'une réforme structurelle. Cela pourrait permettre d'améliorer le niveau de vie des citoyens à long terme.