Depuis des décennies, le gamchha est une présence omniprésente dans les rues indiennes. Ce foulard traditionnel, fait d'un tissu à carreaux rouge et blanc, sert de serviette, d'oreiller, de turban, de masque pour les yeux et même de drapé sur l'épaule. Principalement utilisé par les classes ouvrières du Bengale occidental et d'autres régions, il a récemment fait l'objet d'une exposition unique à Delhi.
Intitulée Gamchha: De l'Ordinaire à l'Extraordinaire, l'exposition a présenté plus de 250 pièces de ce drapé court provenant de 14 États indiens. Elle a mis en lumière les variations de ce foulard à travers les régions. Des gamchhas blancs du Kerala avec des bordures colorées fines, aux modèles tissés Ikat d'Odisha, en passant par le "gamusa" en coton d'Assam, chaque interprétation variait entre production industrielle et artisanale.
Cette exposition fait partie d'une série d'initiatives visant à redéfinir notre compréhension des textiles indiens. Des silks riches, des brocades à motifs et des chintz complexes, la contribution de l'Inde à l'industrie textile mondiale est unique. Malgré cette reconnaissance, sa documentation a longtemps été exclusionnaire et n'a pas suivi les pratiques contemporaines de l'industrie.
Organisées par des fondations d'art et d'artisanat, ces nouvelles expositions, en collaboration avec des collectionneurs privés et des musées, suscitent un véritable renaissance dans le secteur. La fondatrice de l'Indian Crafts Revival Trust, Ritu Sethi, souligne que la technologie et les plateformes numériques contribuent à faire tomber l'anonymat des artisans.
Ces expositions mettent l'accent sur l'importance de sortir des sentiers battus des designers urbains, souvent formés dans des écoles élitistes. Elles visent à intégrer directement les artisans locaux. Selon David Abraham, un designer de renom, il s'agit d'un retour aux sources et d'une reconnaissance de la fierté et de la valeur des textiles indiens.
Les liens culturels avec les textiles sont profondément ancrés. Les couleurs, les tissages et les tissus portent chacun une signification. Ces expositions réaffirment la valeur de ces traditions dans notre système culturel, tout en élargissant le récit au-delà des richesses associées aux palais et aux rituels.
Des événements comme Textiles of Bengal: A Shared Legacy, exposé à Kolkata, mettent en avant l'unicité historique des traditions textiles du Bengal. On y trouve des tissus et des vêtements jamais vus auparavant, allant des sarees en coton aux broderies indo-portugaises, témoignant de l'héritage riche de la région.
Les expositions incluent également des démonstrations de techniques artisanales et des performances culturelles, comme celle de la danseuse Purnima Ghosh, qui a interprété un numéro en sari batik. L'objectif est de ramener l'attention sur l'héritage partagé du Bengal avec le Bangladesh, à travers les textiles, les techniques et les histoires narratives.
Des expositions comme Pampa: Textiles of Karnataka mettent en lumière des traditions moins connues, comme les travaux de broderie des Lambanis et les quilts Kaudi de la communauté Siddhi. Ces événements racontent l'histoire des communautés nomades et tribales, tout en mettant en avant leurs luttes et leurs résiliences.
De plus, des initiatives comme Pehchaan: Enduring Themes in Indian Textiles tentent de combler le fossé entre l'histoire et l'innovation. Ces projets documentent rigoureusement l'histoire des textiles, ce qui est essentiel pour inspirer la nouvelle génération de designers.
Le succès de ces expositions laisse entrevoir un avenir prometteur pour l'industrie textile indienne. Selon Mayank Mansingh Kaul, les prochaines années seront dédiées à renforcer cette écologie créative. En élargissant le public et en collaborant davantage, l'objectif est d'inspirer la prochaine génération d'artisans à rechercher la qualité.