Comment le traumatisme peut-il affecter la mémoire et le témoignage devant le tribunal ?

Introduction

Dans le cadre du procès pour agression sexuelle impliquant cinq anciens joueurs de hockey junior canadien, la plaignante, connue sous le nom d'E.M., a déclaré que le traumatisme subi a obscurci sa mémoire. Ce phénomène suscite un intérêt croissant parmi les chercheurs qui étudient l'impact du traumatisme sur le cerveau et la mémoire, en particulier dans le contexte judiciaire.

Le témoignage d'E.M.

E.M. a passé neuf jours à témoigner par vidéo au tribunal de Londres, en Ontario. Elle a affirmé que son souvenir des événements de la nuit de juin 2018 était altéré par le traumatisme des agressions sexuelles alléguées. Les cinq accusés, Michael McLeod, Alex Formenton, Carter Hart, Dillon Dubé et Cal Foote, plaident non coupables.

La question de savoir si les actes allégués étaient consensuels ou criminels sera tranchée par le juge. Cependant, l'impact du traumatisme sur la mémoire a été un thème récurrent durant le contre-interrogatoire. E.M. a déclaré : "Je pense que le traumatisme d'être dans la chambre a causé une rupture complète de ma personnalité."

Impact du traumatisme sur la mémoire

Le Dr Robert Maunder, psychiatre, explique que le stress lié à un événement traumatique peut influencer la manière dont le cerveau enregistre les souvenirs. "Cela peut rendre les souvenirs intenses et détaillés, mais aussi créer des lacunes et des incohérences", a-t-il affirmé.

Les personnes ayant vécu un traumatisme peuvent sembler moins cohérentes lors de leur témoignage, ce qui peut les faire percevoir comme des témoins peu fiables. Le Dr Maunder souligne que cela peut mener à des souvenirs fragmentés ou à des détails qui ne sont pas en ordre chronologique.

Les recherches sur la mémoire traumatique

La psychologue Meg Ternes, professeur à l’Université St. Mary’s, indique que le traumatisme peut rendre les souvenirs plus fragmentés et dispersés. Elle précise que les chercheurs ne peuvent pas reproduire des événements traumatiques en laboratoire pour des raisons éthiques, ce qui complique l'étude des effets du traumatisme sur la mémoire.

Ternes souligne que les témoins peuvent se concentrer sur leur expérience personnelle, ce qui influence leur perception des événements. "Certaines personnes se dissocient pendant un événement traumatique, ce qui peut avoir un impact négatif sur leur mémoire", ajoute-t-elle.

Préparation des plaignants pour le contre-interrogatoire

Préparer une plaignante pour un contre-interrogatoire est un processus délicat. Selon Ternes, il n'est pas surprenant qu'E.M. ait des lacunes de mémoire concernant certains événements de juin 2018. Cela ne diminue pas sa crédibilité, car il est courant d'avoir des souvenirs flous dans de telles situations.

Le Dr Abraham Snaiderman, psychiatre, note que les questions intrusives peuvent raviver le traumatisme, mais elles sont nécessaires pour établir la fiabilité du témoin. "Il y a un risque de retraumatisation en posant des questions nécessaires, mais intrusives", souligne-t-il.

Conclusion

Le procès pour agression sexuelle en cours met en lumière les défis liés à la mémoire traumatique. Les témoignages des plaignants, comme celui d'E.M., révèlent comment le traumatisme peut influencer la perception et la narration des événements. Cela soulève des questions importantes sur la manière dont le système judiciaire traite ces témoignages, souvent marqués par la douleur et l'incertitude.